Les anciens immeubles de Paris Nord ne sont pas (tous) morts, la preuve. L’artiste Nicolas Pierre immortalise les bâtiments marquants de son enfance en modèle réduit. Son projet « Street miniature Paris » témoigne et rend hommage à un Paris qui se fait de plus en plus petit. Voyez plutôt.
Rideau tagué, feuilles d’automne sur la chaussée, poubelles vertes, boites aux lettres jaunes, épicerie du coin… Pas de doute, on est bien dans le Nord de Paris. Enfin pas tout à fait. Bienvenue dans « Street miniature Paris », le projet de l’artiste passionnant et passionné Nicolas Pierre. Visite des bâtiments et rues de Paris à échelle réduite, dans son atelier grandeur nature, perché au 3e étage d’un immeuble de Saint-Ouen !
« Les bâtiments que j’immortalise en miniature sont tous symboliques » confie le trentenaire. « Certains existent, d’autres sont détruits ou pas loin de l’être. Mais tous gardent sur leurs murs les traces des époques qu’ils ont traversées. L’idée est avant tout de montrer des paysages urbains qui changent ou ont changés. De garder une trace ». Voilà qui nous fait un joli point en commun. . .
Même si la gentrification du Nord de Paris et de sa proche banlieue joue un rôle important dans la démolition de certains immeubles, pas question pour le maquettiste de tomber dans le manichéisme facile : « Le fil rouge de mes réalisations est plus les immeubles anciens et l’atmosphère qui s’en dégage que la volonté d’affirmer que c’était mieux avant. Paris change, c’est un fait. Loin de moi l’envie de dire si c’est bien ou mal. Seulement permettre à qui veut de se plonger le temps d’un instant dans un Paris révolu ou en passe de le devenir ».
Quand il dit se plonger, il y a de quoi. Des graffitis sur les façades aux étalages de l’alimentation générale, en passant par les lumières blafardes du Bar PMU et autres enseignes reconnaissables entre toutes, l’illusion est bluffante. L’artiste poussa le réalisme à son paroxysme. On sentirait presque l’odeur du maïs grillé, du café chaud et de la viande à la broche qui tourne.
Pour arriver à une telle précision, l’Audonien de naissance puise dans ses souvenirs d’enfances mais pas que. « Je prends en photos les façades qui m’inspirent puis j’utilise Google Street View et son historique pour les détails ». Le talent fait le reste. Le talent, une grosse dose de patience, de minutie (même avec un chat dans les parages !), de coups de cutter, d’impression, de retouches graphiques et bien sûr, de passion.
Le résultat est si concret que Nicolas reçoit des messages d’encouragements de street-artistes dont il a immortalisé le travail sur les murs de ces œuvres miniatures. À l’instar de Yola, street-artiste polonaise qui a reconnu son installation artistique faite en 2011 sur l’immeuble boulevard de La Chapelle avant sa démolition et a contacté notre maquettiste pour le bon souvenir !
Si ce décor est familier à tout enfant du Nord parisien qui se respectent, les bâtiments qui le constituent le sont tout autant. Peut-être trop. « Mes bâtiments sujets sont en apparence banals. En les transposant en miniature, on les voit différemment, sortis de leur contexte. Ils deviennent ainsi plus symboliques, presque poétiques ».
Effectivement, « poétique » ne serait pas le premier adjectif qu’on donnerait à la maison Porte de Clignancourt (toujours debout), trônant au bord du périph’ à cheval entre Paris et Saint-Ouen. Pourtant, en prenant un moment pour l’admirer en contre plongée version miniature, elle évoque plus une époque particulière que le traditionnel bruit des klaxons ambiants.
Alors Pari(s) réussi pour « Street miniature Paris » ? On dirait bien.
Prochaines promenades en 1/87 (ou 1/43) ? « J’ai envie d’immortaliser le légendaire Tati Barbès – celui de l’angle sur le Boulevard – et pourquoi pas un des immeubles Place Pigalle ». Vu le réalisme des 6 maquettes existantes, on ne doute pas que l’illustrateur rende sa lumière aux néons de notre Quartier rouge.
Hâte de voir ça !
Si ça vous a donné envie de voir ce Paris version mini de vos propres yeux c’est normal. Toutes pandémies gardées, Nicolas Pierre et sa « Street Miniature Paris » devrait exposer courant 2021. On vous tient au courant et on se voit sans doute là-bas !