Coup de tonnerre dans la rue des Trois Frères, à Montmartre. Les heureux détenteurs de terrasses éphémères parisiennes sont invités à renouveler leur demande, soumises « à autorisation de l’administration à compter du 1er juillet 2021 » précise un mail de la Mairie envoyé le 24 juin 2021. Une simple formalité pour d’autres, un couperet pour certains, bien décidés à ne pas débarrasser le plancher (de leurs terrasses estivales).
Il a suffi d’une ligne, quelques mots, pour faire vaciller la reprise fragile de leur commerce, déjà bien éprouvé par la crise sanitaire : la Ville ayant opéré une révision du Règlement des étalages et des terrasses interdisant désormais « l’installation sur stationnement réservé (place de livraison, place personnes handicapées, taxis, motos, scooters, station de vélos, trottinettes, Mobilib, transports de fonds » peut-on lire sur le site de la Mairie. Un revirement de situation qui ne passe pas pour les restaurateurs de la rue des Trois Frères, hélas installés du mauvais côté de la rue… sur des emplacements deux-roues. Ils demandent une dérogation dans les plus brefs délais pour empêcher le retrait des terrasses estivales à Paris.
« Laissez-nous travailler ! » scandent-ils d’une seule voix lors d’une concertation avec l’opposition du 18e. Les attachés parlementaires du député Pierre-Yves Bournazel, Christian Honoré et Samir Belaïd, ont fait le déplacement ce vendredi 24 juin 2021 sur les hauteurs de notre Butte d’amour. Pour Christian Honoré, ces terrasses sont « une bouffée d’air frais pour le quartier. C’est dommage de pénaliser des commerçants, surtout en cette période ».
Le politique entend alerter la Mairie sur la situation des tenanciers installés sur le mauvais trottoir lors d’une intervention au prochain Conseil de Paris, lundi 28 juin 2021. « Il en va de l’équité, la justice. Ce n’est pas normal que les restaurateurs n’aient pas tous les mêmes droits. Il faut impérativement que chacun soit logé à la même enseigne et qu’aucun ne soit discriminé à cause d’un mauvais emplacement ».
Plus que quelques assiettes de frites, cocktails et autres crêpes maison servis avec amour, le retrait de ces terrasses estivales à Paris entrainera dans sa chute une dizaine d’emplois après la disette de 2020/2021. « Si je n’ai plus ma terrasse, je licencie mes deux serveuses. Je n’aurai plus les moyens de les garder sans mes tables extérieures » se désole Lætitia, restauratrice dans la rue des Trois Frères depuis 15 ans.
Même son de cloche pour les autres membres de leur toute nouvelle association, créée pour contrer la disparition annoncée de leurs terrasses estivales. « On a pris quelqu’un en renfort spécialement pour les gros services d’été. Si on sucre notre terrasse, c’est fini » prédit Ben, lui aussi commerçant indépendant.
Pour Idylle, une voisine habituée des lieux, cette réforme est tout aussi désolante, voire scandaleuse : « c’est quand même mieux de voir des sourires dans la rue que des vrombissements de moteurs non ? ».
Un argument clivant que ne partage pas l’ensemble des restaurateurs concernés, eux-mêmes utilisateurs de deux-roues. « On ne veut pas faire la guerre aux deux-roues, loin de là. On veut simplement pourvoir exercer comme tout le monde, en trouvant des solutions justes et réfléchies » tonne Olivier, propriétaire de Mamie Colette.
Christian Honoré acquiesce : « Il est tout à fait possible de déplacer les parkings motos pour mettre tout le monde d’accord. C’est ridicule ! ».
Il ne reste plus qu’à la Mairie de Paris d’en être, elle aussi, persuadée. Pour la ribambelle de riverains, voisins, habitués et autres clients attablés dehors, la pétition est signée ! En attendant la date fatidique du 1er juillet, tous l’assurent : ils n’enlèveront pas leur terrasse et feront tout pour obtenir leur dérogation.
Cheers !