Report de circulation rue de Ménilmontant : les oubliés de la politique écologique parisienne ? Les habitants de la rue de Ménilmontant sont en colère. Le désengorgement de l’avenue Gambetta s’est fait au détriment de sa parallèle. « Mais oui Madame », comme le chantait Charles Trenet. Point sur les avancées de la mobilisation riveraine et ses pourparlers avec la mairie.
« Ménilmontant asphyxié » peut-on lire en lettres fluo sur une bâche bleue pendue à la palissade de la petite ceinture. Nous sommes au croisement de la rue Sorbier et de la rue de Ménilmontant. Ici l’ambiance villageoise a laissé sa place au bourdonnement de la circulation. En cause ? Le report de circulation rue de Ménilmontant.
Juliette et Blandine, toutes deux habitantes du quartier, se mobilisent avec le voisinage pour faire entendre leurs revendications à la mairie. Groupe Facebook, affichage dans la rue, pétition… Au total plus de 3000 personnes ont exprimé leur mécontentement suite au report de trafic du grand axe qu’était Gambetta sur la rue de Ménilmontant, plus étroite.
Une mesure prise à la hâte
Au printemps dernier, la mairie de Paris a entrepris d’adapter la voirie aux contraintes de la situation d’urgence sanitaire. L’objectif ? Désencombrer les transports en commun pour favoriser le respect des gestes barrière. La manœuvre converge avec la politique du « tout-vélo » de la mairie Hidalgo. Plusieurs axes deviennent entièrement piétons ou cyclables : c’est la naissance des surnommées « coronapistes ». Parmi elles, l’avenue Gambetta. Permettant auparavant de quitter Paris pour sa banlieue Est, cette artère a été réduite à une seule voie descendante pour les voitures.
La nouveauté semble convenir aux habitants de l’avenue mais le bât blesse quelques centaines de mètres plus loin, rue de Ménilmontant.
Vincent Goulin, adjoint EELV au maire du 20e, en charge des transports et mobilités, fait aveu de la précipitation dans laquelle la décision a été prise. « Tout a été rapide au niveau de la mise en œuvre à cause de l’urgence sanitaire. Il n’y a pas eu le temps ni les moyens de réaliser des études d’impact pendant le confinement, ce que nous regrettons ». Un empressement qui ne caractérise pas la recherche de solutions quant au(x) problème(s) généré(s).
A toute heure on respire facile rue de Ménilmontant pic.twitter.com/0R3sE0LsBi
— Bed (@Bed1965) November 16, 2020
De l’humain dans les politiques écologiques
« En fermant deux voies sur les trois qui montaient, ça bouchonne forcément. Les voitures ne vont pas disparaître par magie » se désole Juliette.
Il y a un an c’était la rue de Belleville, autre axe parallèle, qui passait à sens unique. Escarpée et commerçante, Ménilmontant est aujourd’hui la dernière voie de sortie vers la périphérie par l’Est de Paris. Pour comprendre l’ampleur de la grogne, rendez-vous dans la section « commentaires » de la pétition en ligne.
Accroissement de la pollution de l’air, nuisances sonores, sécurité des écoles environnantes, atmosphère désagréable, baisse de fréquentation des commerces (avant le reconfinement), entrave à l’itinéraire du bus 96 : les riverains ne manquent pas d’arguments. L’avenue Gambetta longeant le cimetière du Père Lachaise, la situation inverse aurait-elle causé moins de remue-ménage ?
M. Goulin assure que la mairie centrale (seule décisionnaire des modifications de voirie) a lancé une étude d’impact à postériori. « Ses premiers résultats et des ébauches de scenarii de sortie de crise » seront divulgués lors d’une rencontre publique en ligne. Elle est organisée le 26 novembre et sera suivie d’une autre à la mi-décembre qui annoncera les mesures correctives.
Le mystère reste donc pour le moment entier sur la nature des dits scenarii. L’adjoint ne divulgue qu’une seule information sur les issues possibles de la réunion : « La piste cyclable de l’avenue Gambetta est un impératif. On ne pourra pas déroger à son installation ».
En attendant d’obtenir de réelles réponses, les habitants ne peuvent s’empêcher de se sentir abandonnés. Eux qui rêvaient du Paris « plus apaisé, moins bruyant et moins pollué » que promettait la mairie, il serait dommage qu’ils en soient les sacrifiés.
Photo de couverture : © flyintiger