Dans le quartier parisien du 20e arrondissement, la terrasse du bar « Culture Rapide » a laissé sa place aux « Soupes de Belleville ». Une initiative solidaire basée sur le partage et la convivialité, qui fait de son mieux pour pallier la morosité ambiante.
« Aujourd’hui on a légumes verts/pois-chiches ou chou chinois/curry » me propose une bénévole attentionnée au comptoir de la distribution. Bonne nouvelle pour mes doigts gelés ! Du lundi au dimanche et de 12 à 18 heures sur la place Fréhel, les bénévoles des « Soupes de Belleville distribuent potages, cafés, gâteaux, vêtements, jouets…
Ce qui avait commencé comme « un marché de Noël gratuit, pour les copains du quartier qui sont à la rue » promet maintenant de s’étendre « au moins jusqu’à la fin de l’hiver », selon l’appel aux dons du collectif.
Et il faut dire que le besoin est réel. Véronique Fayet, présidente du Secours Catholique, l’expliquait déjà en novembre sur France Inter. En plus de tirer vers le bas les plus précaires, la crise a créé de nouveaux bénéficiaires des associations caritatives. « Il n’y a pas que les gens à la rue qui galèrent » appuie Sylvie, bénévole régulière.
Derrière cette action, il y a Pilote Le Hot ou Pilote Le Poète. Doudoune rouge et chapka tartan, impossible de passer à côté du patron de Culture Rapide qui circule dans les allées du barnum. Tantôt guidant une nouvelle recrue, tantôt installant la scène pour le concours de slam de l’après-midi, il n’est jamais avare d’une blague ou d’un trait d’esprit.
Comme beaucoup de cafetiers parisiens, Pilote avait profité de l’été 2020 pour construire une jolie terrasse couverte à son bar. Lorsque la fermeture des cafés et restaurants a été annoncée à l’automne, il eut été dommage de gâcher le potentiel de ce bel édifice.
Quelques gouttes d’huile de coude plus tard, la place Fréhel était habillée par la version actuelle de cette structure : bariolée, joviale, avec ses boules à facettes et ses pancartes rigolotes. Son toit en plexiglas laisse passer la lumière du jour et la musique y résonne comme un souvenir du bon vieux temps. C’est ainsi que, du besoin d’agir et de maintenir le lien social, sont nées « Les Soupes de Belleville ».
« Je passe souvent depuis que j’ai vu l’affiche dans une boulangerie » me dit Karim*, tout sourire. Avec lui, Nora* vient pour la première fois. Tous deux font partie de la CSP75, la Coordination des Sans-Papiers de Paris. Nora me parle de la Tunisie dont elle est originaire, de son contexte politique qui l’a poussé à venir trouver refuge en France.
« Ici c’est mieux, mais c’est quand même dur alors on organise des marches, de l’aide administrative et juridique, pour trouver un logement, essayer de s’intégrer ». C’est aussi par ce biais qu’ils ont pris connaissance des Soupes de Belleville. Karim m’explique que fréquenter le milieu associatif lui permet de bien connaître les différentes aides qui existent à Paris.
« S’occuper en faisant quelque chose qui a du sens »
Je complimente Sylvie sur la soupe de pois-chiches. « C’est le resto grec d’en face ! Il contribue et nous donne des petites recettes. ». Le ciment des Soupes de Belleville, ce sont les dons et la participation de toutes les personnes qui leur permettent d’exister. En invitant les riverains à participer et à contribuer au projet, le croisement de la rue Julien Lacroix et de la rue de Belleville donne de l’âme au quartier.
Le magasin Biocoop et le marché du boulevard se séparent de quelques fruits et légumes, les voisins donnent des jouets, des vêtements… « Tu l’as manqué mais tout à l’heure on avait du far breton qu’a fait la voisine ! » continue Sylvie. Chaque jour, cinq à huit bénévoles se relaient pour installer le stand, préparer ou réchauffer les soupes et les servir. « Tout est facile car très bien organisé ! » se réjouit Élodie, main-forte du dimanche après-midi.
Emmitouflée dans sa parka, elle vient donner de son temps une fois par semaine. Elle habite le quartier et connaissait déjà bien le bar. « Maintenant que les activités possibles sont réduites, autant s’occuper en faisant quelque chose qui ait du sens, et puis ça permet de rencontrer des gens ! C’est vrai, on ne rencontre plus personne maintenant… ». Un sentiment partagé par Sylvie qui télétravaille depuis le début de la crise. « On a la chance d’avoir un taf, mais au moins ça nous permet de sortir un peu » précise-t-elle.
Pour vous engager, il suffit de vous inscrire au créneau qui vous convient sur le site dédié. Clair et simple d’utilisation, ce site est la contribution d’une personne qui a bien voulu donner de son temps et de ses compétences pour offrir une vitrine au projet.
Vous n’avez pas de temps à donner ? Vous pouvez également soutenir les distributions par un don financier via la cagnotte en ligne ou directement sur place. Avec un peu de chance, vous tomberez sur une compétition de slam en plein air, la grande spécialité du bar Culture Rapide !
*Ces prénoms ont été modifiés
Les Soupes de Belleville
Place Fréhel – Paris 20e
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